Cour de cassation, chambre criminelle, 6 février 2024, n°23-81.748 : Le risque pénal et la transformation de son activité commerciale sans autorisation d’urbanisme ;
De tout temps et d’autant plus en période de crise, les commerçants cherchent à pérenniser leur activité commerciale et sont amenés pour ce faire à se diversifier.
Si l’intention est louable et si ces modifications sont parfois même vitales, il faut garder à l’esprit qu’elles n’en restent pas moins parfois soumises à autorisation d’urbanisme.
C’est le cas lorsque ces modifications emportent changement de destination du local (Article R. 151-28 du Code de l’urbanisme), les destinations autorisées pouvant être restreintes par le règlement du document d’urbanisme applicable.
Pour rappel, le changement de destination sans travaux est soumis à déclaration préalable (Article 421-17 b) du Code de l’urbanisme et à permis de construire lorsqu’il s’accompagne de travaux de modification des structures porteuses ou de la façade du bâtiment (Article R. 421-14 c) du Code de l’urbanisme).
En l’absence d’une telle autorisation, le juge pénal est doté de larges pouvoirs il peut notamment ordonner la mise en conformité des lieux ou des ouvrages (Article L. 480-1 et suivants du Code de l’urbanisme).
1 – En effet, l’alinéa 1 de l’article L.480-5 dudit Code ajoute que :
« En cas de condamnation d’une personne physique ou morale pour une infraction prévue aux articles L. 480-4 et L. 610-1, le tribunal, au vu des observations écrites ou après audition du maire ou du fonctionnaire compétent, statue même en l’absence d’avis en ce sens de ces derniers, soit sur la mise en conformité des lieux ou celle des ouvrages avec les règlements, l’autorisation ou la déclaration en tenant lieu, soit sur la démolition des ouvrages ou la réaffectation du sol en vue du rétablissement des lieux dans leur état antérieur ».
En plus de la peine d’amende prévue à l’article L. 480-4 du Code de l’urbanisme (ou de prison en cas de récidive), le Tribunal peut ordonner la remise en état des lieux si cela est possible et à défaut la démolition des ouvrages ou la réaffectation des sols pour un rétablissement des lieux dans leur état antérieur, au besoin sous astreinte (Article L. 480-7 du Code de l’urbanisme).
2 – Dans cette affaire, une société ayant obtenu un permis de construire sur le fondement d’une activité d’ostréiculture a fait évoluer son activité en transformant un local initialement destiné au stockage et au conditionnement des crustacés, en espace de restauration. Pourtant, le règlement du PLU indiquait que « seules les constructions ou installations nécessaires aux services publics ou à des activités économiques
exigeant la proximité immédiate de l’eau sont autorisées, le changement de destination des bâtiments existants n’étant autorisé que s’ils sont nécessaires à un intérêt général lié à la mer et aux activités de la mer ».
Cela n’incluait pas l’activité de restauration.
Au-delà des agrandissements et travaux réalisés sans autorisation d’urbanisme, cette activité de transformation de la destination du local vers une activité de restauration, prédominante d’un point de vue économique, a été sanctionnée par le juge.
A ce titre, la Cour de cassation précise que « la seule circonstance que l’infraction porte sur l’utilisation de bâtiments de manière non conforme à celle autorisée par le PLU ne faisant pas obstacle à ce qu’une telle mesure à caractère réel soit prononcée ».
Pour la Cour, la seule utilisation du bâtiment de manière non conforme à celle autorisée par le PLU peut donner lieu à une mesure d’injonction de remise en état. Dans le cas d’espèce, cela revient à un retour à l’activité initiale de stockage et conditionnement telle qu’autorisée par le permis de construire initiale. Au-delà de ce risque pénal, des outils sont à disposition du Maire pour contraindre directement l’exploitant.
La vigilance est donc de mise et il convient de solliciter une autorisation avant toute transformation en s’assurant bien que cette activité soit conforme aux destinations autorisées dans le règlement du PLU.
Le cabinet est en mesure de vous accompagner dans cette démarche.